L’entrepreneuriat féminin : des obstacles à franchir Juin 5, 2019
Source: Radio Canada
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1173024/femme-affaires-entreprises-manitoba?partageApp=appInfoiOS&accesVia=partage
Abdoulaye Cissoko
Les statistiques sont éloquentes. Selon Diversification de l’économie de l’Ouest Canada (DEO), sur les 1,2 million de petites et moyennes entreprises (PME) canadiennes, seulement 16 % appartiennent à des femmes.
Pour ce qui est des exportations, l’écart est également visible : 8,4 % des PME appartenant majoritairement à des femmes ont des activités tournées vers l’étranger, comparativement à 12,8 % pour celles détenues par des hommes.
Une partie du financement de 6,7 millions de dollars du gouvernement fédéral servira à promouvoir quatre projets menés au Manitoba, qui visent à renforcer l’appui à l’écosystème pour les femmes d’affaires.
Nancy Brommell, conseillère en affaires au Centre d’entreprise des femmes, dit que, depuis plus de deux décennies, l’organisme aide les femmes d’affaires en mettant à leur disposition des informations et des ressources utiles.
Selon elle, le moment est venu de les aider à en faire plus pour leurs entreprises pour le bien de l’économie canadienne. Cela passe, entre autres, par plus de sensibilisation grâce à l’organisation d’ateliers dans les villages et les communautés éloignées du nord du Manitoba.
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Selon Nancy Brommel, il faut aussi aider les femmes chefs d’entreprise à exporter davantage leurs produits et leurs services.
Ce soutien est donc nécessaire, tant les défis à relever sont nombreux. « Les femmes doivent faire des affaires, mais elles doivent aussi s’occuper de leur famille et, parfois, elles ont même des responsabilités dans la communauté. C’est difficile de déterminer les priorités », explique Mme Brommel.
Le verrou du financement
Les femmes font aussi face au défi d’obtenir du financement auprès des institutions financières pour pouvoir développer leurs entreprises et conquérir des marchés étrangers.
C’est pour cette raison que le Centre d’entreprise des femmes dispose d’un programme visant à soutenir financièrement celles qui veulent démarrer ou agrandir leurs entreprises. « Depuis sa création, il y a 24 ans, le centre a prêté ainsi l’équivalent de 20 millions de dollars aux femmes d’affaires manitobaines », affirme Mme Brommell.
Carole Freynet-Gagné est la présidente d’Apprentissage Illimité, une maison d’édition manitobaine qui conçoit du matériel pédagogique pour la petite enfance. Son entreprise est parmi les 15 bénéficiaires du financement d’Ottawa. Elle a obtenu une subvention de 100 000 $.
Selon elle, les femmes qui se lancent dans l’entrepreneuriat doivent aussi faire face à une autre réalité. « On crée nos entreprises autour de nos familles. Ce qui fait que, souvent, on a du retard et on manque des occasions. Exporter exige des déplacements. Me concernant, mes filles sont maintenant grandes et j’ai donc le temps. C’est pourquoi c’est à ce moment-ci que je me tourne vers l’exportation. Je ne pense pas que j’aurais pu le faire à un plus jeune âge », affirme-t-elle.
Par ailleurs, Carole Freynet-Gagné indique qu’au Canada les entreprises dirigées par des femmes qui exportent ne sont pas nombreuses. Une réalité encore plus frappante lorsqu’on regarde les exportations des entreprises canadiennes de l’autre côté de la frontière, où le marché est dominé par les hommes.
« Ce sont des obstacles majeurs. Je pense que cette subvention est une grande marque de confiance et un investissement important pour que les femmes soient plus présentes dans les affaires. C’est en investissant dans le marché qu’on va se frayer ce chemin », indique Mme Freynet-Gagné.
D’après elle, cette faible présence fait que les établissements financiers sont moins enclins à accorder des crédits aux femmes et que la meilleure de façon de faire sauter ce verrou, c’est justement pour elles d’être plus présentes.
Si le chemin est encore long, nos intervenantes reconnaissent qu’il y a des progrès aussi bien au Canada que dans les autres pays. Toutefois, Mme Freynet-Gagné estime que cela reste fragile.
« On ne doit jamais arrêter d’avancer parce qu’on recule facilement. On voit ce qui se passe dans le monde concernant le droit de la femme. On relaxe un peu, et finalement les choses reculent », conclut-elle.